1 346 876 honduriens ont dit OUI à la constituante.

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Le chemin de le Refondation n’est pas facile. Dérouter politiquement l’oligarchie par des moyens non violents nous impose une discipline de fer, nous impose d’assurer la démocratie interne du FNRP pour garder le soutien populaire et augmenter la base organisée, formée et mobilisée.

mardi 14 juin 2011

Zelaya retourne au Honduras, mais justice n’a toujours pas été faite

Dana Frank, le 2 juin 2011. Le samedi 28 mai, lorsque le président Manuel « Mel » Zelaya rentra finalement au Honduras presque deux ans après avoir été renversé lors d’un coup d’État en juin 2009, la marée humaine vêtue de rouge qui l’accueillit à l’aéroport de Tegucigalpa et qui protestait contre le coup s’étendait si loin dans les rues adjacentes que personne ne pouvait réellement les compter. Ce fut de loin la plus grande manifestation de toute l’histoire du Honduras. Même El Heraldo, un organe de presse en faveur du coup, estima la foule entre 500 000 à 1.5 millions de personnes. Le canal 11 annonça 900 000 personnes – c’est-à-dire 11 pourcent de toute la population hondurienne.

Mais que signifie réellement le retour triomphal de Zelaya? Certainement pas que la justice soit rétablie au Honduras, que la répression ait cessé ou que la question de la justice sociale soit finalement adressée. L’accord avec le président actuel de facto Porfirio Lobo Sosa, dont la médiation fut menée par le président vénézuélien Hugo Chavez et le président colombien Juan Manuel Santos, n’offre rien de plus que d’abandonner les fausses accusations à l’endroit de Zelaya, permettant son retour.

Le retour de Zelaya est symboliquement très important pour le peuple. Même de la part de ceux qui sont normalement plutôt critiques envers lui, il reste le grand symbole de la résistance au coup militaire et à l’ordre constitutionnel. Son retour offre une lueur d’espoir et affecte dramatiquement le paysage politique hondurien.

Mais les supporters du régime actuel sont satisfaits aussi. Au Nord, les médias commerciaux étatsuniens furent prompts à déclarer que « la crise est désormais terminée ». La Secrétaire d’État Hillary Clinton, qui semblait chercher le retour de Zelaya à tout prix afin de créer un semblant de démocratie bipartite, annonça immédiatement que le Honduras pourra désormais être réadmis dans l’Organisation des États Américains. Chose dite, chose faite: le mercredi 1er juin, l’OEA réintégrait effectivement le Honduras, avec l’Équateur en tant que seule voix discordante.

Mais cet accord ne fait rien de concret afin de résoudre la crise des droits humains au Honduras. Tel que mentionné au cours d’une déclaration émise par 20 groupes importants – représentant des juges honduriens, des ministres, des femmes, des autochtones, des groupes LGBT, des afro-descendants et des activistes des droits humains – les conditions originales pour la réadmission à L’OEA, incluant les procédures judiciaires à l’endroit des responsables du coup, sont loin d’avoir été atteintes. « Des violations innombrables aux droits humains » furent commises durant le coup d’État, notent-ils, mais l’accord « ne prend pas en compte ces faits, ni ne promeut l’établissement d’un mécanisme effectif pour leur enquête, leur sanctionnement, ainsi que leur juste réparation ».

La répression de l’opposition au cours des derniers trois mois était en fait pire qu’elle ne le fut durant la période suivant tout juste le coup d’État. La police et les militaires sous les ordres de Lobo font désormais régulièrement usage de bombes lacrymogènes comme des armes létales. Les menaces assassinats de journalistes travaillant pour l’opposition perdurent (deux meurtres pour le mois de mai) et des paramilitaires s’en prennent impunément à des activistes paysans l’un à la suite de l’autre dans la vallée de l’Aguan, où quatre personnes furent tuées au mois de mai seulement. Deux jours suite à la signature de l’accord, les policiers de Lobo usèrent de gaz lacrymogène et de tirs à balles réelles contre un groupe d’étudiants du niveau secondaire qui protestaient contre le renvoi de leurs professeurs de mathématique.

Qui plus est, le système judiciaire est fortement dysfonctionnel. Selon le COFADEH, le groupe de défense des droits humains indépendant le plus important au pays, l’impunité complète règne en rapport aux 36 assassinats motivés par des fins politiques de même que les 300 meurtres de membres de l’opposition depuis que Lobo prit le pouvoir. Les mêmes officiers militaires qui réalisèrent le coup d’État sont en charge des forces armées et de l’entreprise étatique de téléphonie.
Dans le cadre de cet accord, Lobo – lui-même élu suite aux élections frauduleuses de novembre 2009, contrôlées par l’armée et boycottées par l’opposition et des observateurs internationaux – promis du bout des lèvres de porter attention aux droits humains. Mais sans rien de concret dans le texte, il n’en est rien de plus que le renard promettant d’être encore plus attentif au poulailler. « Les droits humains ne peuvent être sujets à des négociations d’ordre politiques » emphatisa le COFADEH en réponse à l’accord.

Heureusement, une part croissante du Congrès étasunien ne s’y fait pas prendre. Le 31 mai, 87 membre de la Chambre des représentants firent parvenir une lettre à la Secrétaire Clinton, parrainé par les Représentants James McGovern, Jan Schakowsky et Sam Farr, exprimant leurs préoccupations face à la situation des droits humains au Honduras et demandant la suspension de l’aide militaire policière au Honduras – ce sont 30 signataires de plus que lorsqu’une lettre similaire fut envoyée en octobre dernier.

Et qu’en est-il de la résistance hondurienne, qui a déjà tant souffert?

Il est extrêmement compliqué de faire face à la nouvelle réalité que constitue la présence de Zelaya et son accord avec Lobo. À l’interne, un débat houleux a lieu entre ceux qui supportent l’entrée du Front national de résistance populaire (FNRP) dans le jeu politique électoral dès maintenant – ce qui peut signifier l’atteinte du pouvoir politique formel, mais aussi le risque de tomber dans des schèmes de patronage opportuniste, en d’autres mots de glisser vers une version revampée du vieux Parti libéral oligarchique – ainsi que la base du mouvement social à l’intérieur de l’opposition, plus préoccupée au sujet du processus décisionnel à l’intérieur du Front, qui désire prendre son temps afin de construire une solide base horizontale.

Au cœur de ce nouveau contexte politique extrêmement changeant, la question est comment saisir cette masse d’Honduriens politiquement engagés toute de rouge vêtue et la transformer en changement social, économique et politique fondamental. Tel qu’exprimé par l’intellectuel hondurien Eugenio Sosa lorsque ce dernier fut interrogé par la radio alors que l’avion de Zelaya était sur le point d’atterrir, « cette multitude – pour quoi faire? ».

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